Thorunn Egilsdottir
Corporate Communication Manager
14 avril 2022

Au revoir économie linéaire. Bonjour économie circulaire !

Le processus manufacturier de l’économie linéaire est responsable de la moitié des émissions mondiales. L’extraction des ressources est également à l’origine d’autres problèmes, comme le déclin de la biodiversité, le stress hydrique ou encore le déversement illégal de déchets, et peut avoir des conséquences néfastes sur les populations, notamment dans les pays en développement. L’économie circulaire, en revanche, est synonyme de développement durable. Toutefois, il ne s’agit pas d’une solution miracle sans contrepartie. Un profond changement s’impose en ce qui concerne l’extraction des matériaux, la production et le comportement des consommateurs. Autrement dit, toutes les parties prenantes doivent s’impliquer. Rencontre avec Mme Laurence Tock, Chargée de direction, Economie circulaire et Technologies durables au Ministère de l’Économie, qui nous explique en détail les principes de l’économie circulaire.

La bonne nouvelle, c’est que :

- l’Europe a publié son plan d’action pour l’économie circulaire en 2020 ;

- le Luxembourg a présenté en 2021 une stratégie pour une économie circulaire (cf. www.circular-economy.lu) ;

- Joe Biden a récemment plaidé en faveur du « droit à la réparation » et on observe une multiplication des « Repair Cafés » organisés à l’échelle locale.

1. Mme Tock, chacun s’accorde à dire qu’il est préférable de réduire, réutiliser et recycler les produits au lieu de les jeter une fois utilisés. Cela peut paraître facile, mais comment développer l’économie circulaire à l’échelle mondiale ?

La première étape consiste en fait à « repenser » notre approche, c’est-à-dire à concevoir des produits de grande qualité qui ont une durée de vie plus longue (réduire), qui sont réparables en vue d’être réutilisés et qui peuvent être démontés, afin que les composants et les matériaux puissent être correctement recyclés ou réintroduits dans le cycle biologique (dans le cas de matériaux d’origine biologique). Le Ministère de l’Économie accompagne les entreprises dans cette démarche, par exemple au travers des programmes de subvention « Circular by Design Challenge » et « Fit4Circularity ».

Afin d’apporter un réel soutien à tous les modèles économiques circulaires évoqués, nous devons également veiller à ce que les informations pertinentes concernant les propriétés circulaires d’un produit, soient mises à la disposition de la personne désireuse de s’engager dans cette voie. Lancée en 2018 par le Ministère de l’Économie, l’initiative « Product Circularity Data Sheet » (Fiche de données sur la circularité des produits - PCDS) vise à répondre à cette préoccupation. Elle rassemble plus de 50 entreprises qui ont élaboré un système à trois volets, permettant de diffuser des données fiables sur les caractéristiques de circularité tout au long de la chaîne de valeur. Cette initiative prévoit la rédaction d’une norme ISO, avec le soutien de l’ILNAS.

2. Quels sont les principaux défis à relever pour passer d’une économie linéaire à une économie circulaire ? L’aspect pratique de l’achat en ligne ? L’offre de produits bon marché mais qui ne durent pas ?

Pour favoriser la circularité, tous les experts reconnaissent qu’un certain nombre d’aspects doivent être améliorés en tenant compte de différents facteurs, comme une durabilité accrue, l’amélioration de la qualité, l’allongement de la durée de vie des produits, une plus grande réparabilité, la disponibilité de pièces de rechange, l’utilisation de matériaux durables, etc., comme expliqué précédemment.

La mise à disposition de données fiables et transparentes concernant la circularité d’un produit ou d’un service (par ex. le PCDS en tant que norme professionnelle, mais aussi les labels de consommation comme l’indice de réparabilité en France) est également une condition essentielle pour instaurer la confiance tout au long des chaînes de valeur liées à la production et à la consommation. Mais surtout, la société doit reconnaître le fait que les ressources et les capacités de régénération biologique de notre planète sont limitées et que l’empreinte matérielle globale de notre société doit diminuer de manière radicale. L’économie circulaire est un outil permettant d’atteindre cet objectif, et il s’agit non pas d’une question d’achat en ligne ou de prix des produits, mais de l’alignement des modèles économiques et des produits sur les principes de l’économie circulaire.

3. Le Luxembourg a-t-il dressé un bilan faisant état de la situation actuelle par rapport à la situation recherchée ?

À ce jour, le Luxembourg n’a pas effectué d’analyse des carences à l’échelle nationale, comme l’ont fait d’autres pays avec des résultats très décevants. Au niveau mondial, on estime que l’économie circulaire représente moins de 9 % (https://www.circularity-gap.world/2022). Mais le STATEC prépare actuellement des indicateurs de mesure de la circularité pour le Luxembourg, où la difficulté de recueillir de telles données réside souvent dans les caractéristiques de notre économie (par ex. les flux considérables d’importation et d’exportation, l’ampleur du secteur des services, etc.).

Un excellent indicateur de l’écart entre la situation réelle et la situation souhaitée est déjà le Jour du dépassement mondial, classement dans lequel le Luxembourg figure hélas aux premières places. À la mi-février 2022, nous avions déjà consommé toutes les ressources naturelles que la planète peut nous fournir pendant une année entière, ce qui signifie que notre mode de vie se construit aux dépens de nombreux pauvres à travers le monde et de nos enfants.

4. À quels risques sommes-nous confrontés si nous ne réalisons pas cette transition dans les prochaines années ?

Nous faisons face à un certain nombre de risques, essentiellement liés à la disponibilité des ressources et à l’impact des déchets produits sur l’environnement. Aujourd’hui, le modèle de surconsommation exerce une forte pression sur la disponibilité des matières premières et pousse leur prix à la hausse. Par ailleurs, nous sommes confrontés à une accélération des crises climatiques et à un déclin rapide de la biodiversité, ce qui menace les fondements de la vie sur terre, ou tout au moins la survie des espèces les plus développées comme l’être humain. À cela s’ajouteront les conflits autour des ressources, de l’eau des denrées alimentaires, des combustibles ou encore des minéraux. Il faut donc faire en sorte que la consommation revienne à un niveau normal et acceptable, considéré comme viable pour la planète. L’économie circulaire offre de nombreuses possibilités de mieux faire sur le plan économique tout en apportant des avantages sur le plan social et environnemental. 

5 conseils pratiques pour contribuer au succès de l’économie circulaire :

Ces conseils sont bien entendu très personnels, mais je suis convaincue que nos propres habitudes jouent un rôle important. Posez-vous les bonnes questions, afin de consommer de manière plus responsable :

1. Ai-je vraiment besoin de ce produit ?

2. Que puis-je faire pour consommer moins, par ex. en partageant avec d’autres ?

3. Comment faire en sorte que les produits que je possède durent plus longtemps ?

4. Comment faire profiter quelqu’un d’autre d’un objet que je n’utilise plus ?

5. Que puis-je faire d’autre pour ne pas jeter un article inutilisé ?

À propos du blog : 

 

Il devient urgent d’opérer une transition rapide vers une durabilité environnementale à l’échelle mondiale. Les entreprises et l'industrie ont d'énormes impacts sociaux et environnementaux. « Pourquoi est-ce important ? »  est un blog bimensuel qui vise à éclaircir ce sujet important à travers le regard de nos experts.


Ne manquez pas les conseils pratiques de nos experts pour votre quotidien et faites partie du changement positif.

Développement durable